L’éditorialiste François Gravel répond à quelques questions
En mai 2023, notre éditorialiste François Gravel a soufflé ses 25 bougies de carrière à l’Acadie Nouvelle. Mais sa relation professionnelle avec le journal remonte à bien plus loin que ça. À l’âge de
10 ans, il distribuait les exemplaires du jour comme camelot à Caraquet. Il confie qu’il a grandi en sachant qu’un jour, il allait travailler dans un média de presse écrite, et l’Acadie Nouvelle était définitivement son premier choix.
Parle-nous dans un premier temps de ton expérience à l’Acadie Nouvelle au cours des 25 dernières années, où tu as exercé plusieurs rôles, dont celui d’éditorialiste – nous reviendrons sur cette tâche précise un peu plus loin.
Bien des années après avoir été camelot, j’ai fait mon baccalauréat en information-communication à l’Université de Moncton, en sachant que la presse écrite me passionnait le plus. J’avais fait un peu de radio communautaire à Edmundston, mais c’est l’écrit qui m’intéressait.
Quand j’ai fait mes débuts à l’Acadie Nouvelle comme stagiaire en 1997, j’ai côtoyé l’éditorialiste à l’époque, Michel Doucet. Je le voyais à l’oeuvre, j’observais combien sa plume était riche et à quel point il était aussi une encyclopédie vivante. Je me disais en le voyant que jamais je ne pourrais être éditorialiste, jamais du moins à la hauteur de ce que Michel a accompli, même si j’en rêvais.
Je ne me doutais pas que j’occuperais un jour le même rôle que lui.
J’ai donc commencé ma carrière comme jeune journaliste, mais maintenant je suis responsable de contenu à la section Actualités. Je suis responsable de la page Une de l’Acadie Nouvelle, je gère les textes à publier et m’assure
que l’heure de tombée sera respectée. J’organise aussi des rencontres éditoriales avec des personnalités publiques, comme récemment avec le premier ministre du Canada Justin Trudeau.
Pourrais-tu nous expliquer davantage ton rôle d’éditorialiste à l’Acadie Nouvelle?
Mon rôle consiste à me prononcer sur des enjeux d’actualité, en particulier ceux qui touchent directement les Acadiens et les francophones du Nouveau-Brunswick. J’exprime des idées et des opinions, mais toujours en m’appuyant sur des faits et sur une argumentation. Ce ne sont pas des opinions gratuites.
Aussi, quand je me présente comme étant l’éditorialiste de l’Acadie Nouvelle, les mots «de l’Acadie Nouvelle» sont extrêmement importants. Contrairement à un chroniqueur, je ne me prononce pas en mon nom, mais bien en celui de l’Acadie Nouvelle. C’est mon nom et mon visage qui accompagnent chacun des éditoriaux que je rédige et qui sont publiés dans nos pages, mais les positions que je défends à l’intérieur de ces éditoriaux-là représentent celles du journal.
Dans tes éditoriaux, tu représentes à la fois la position éditoriale du journal tout en donnant ton analyse et ton opinion personnelle du sujet que tu abordes. Est-ce que ce jeu d’équilibre constitue un défi pour toi et si oui, comment tu réussis à juxtaposer ces deux aspects dans tes textes?
Quand je rédige un éditorial, je garde toujours en tête que j’écris au nom du journal. Je soupèse chacun de mes mots en me demandant chaque fois si je peux les assumer, mais aussi si l’Acadie Nouvelle peut assumer ce que j’écris.
Je m’appuie en tant qu’éditorialiste sur la politique éditoriale de l’Acadie Nouvelle. De plus, je partage les mêmes valeurs que celles qui sont promues par le journal, comme par exemple la solidarité, sans oublier notre biais en faveur de la communauté acadienne francophone que nous desservons.
Cela fait notamment en sorte que
nous dénonçons avec force en éditorial toutes les politiques qui nuisent à l’épanouissement de la communauté acadienne, que ce soit politiquement, économiquement, culturellement
ou autres.
Plusieurs de tes éditos ont généré nombre de commentaires dans les jours suivant leur publication. Pourquoi, selon toi, peuvent-ils soulever parfois les passions ou provoquer des émotions fortes au sein de la communauté?
Je pense que la raison est vraiment simple : l’Acadie Nouvelle est lue. L’Acadie Nouvelle est un journal crédible. Si j’écrivais les mêmes éditoriaux dans une feuille de chou, ils ne feraient réagir absolument personne. L’Acadie Nouvelle a gagné depuis 40 ans une grande crédibilité. Ce qui est écrit dans le journal compte aux yeux de nos lecteurs. Quand j’écris un éditorial, je le fais en sachant qu’il va avoir une portée et que des milliers de gens vont le lire, du Tim Hortons jusqu’au bureau du premier ministre.
Et que tous ces gens-là vont apporter de l’importance à ce qui est écrit parce que c’est dans l’Acadie Nouvelle. C’est une lourde responsabilité quand on y pense.
Et cette responsabilité implique que certains éditoriaux vont faire grandement réagir. Et là-dessus, nos lecteurs sont chanceux parce qu’ils lisent un journal où la direction accepte de publier des éditoriaux qui contiennent des positions fortes, sans les censurer, même en sachant qu’elles vont parfois susciter de vifs débats.
Tu as remporté de nombreux prix au fil des années et tu es appelé régulièrement à commenter l’actualité dans d’autres médias nationaux. Qu’est-ce que cette reconnaissance représente pour toi?
J’ai eu la chance de remporter des prix sur la scène atlantique, mais aussi nationale, autant dans des concours qui sont réservés aux journaux francophones que d’autres où l’Acadie Nouvelle était l’un des seuls journaux francophones participants et parfois même le seul. Oui, je suis fier de toutes ces reconnaissances, mais je remarque que c’est aussi une grande fierté pour nos lecteurs. Je ne compte plus les fois où les lecteurs m’ont félicité pour un prix de l’éditorial de l’année, mais en spécifiant à quel point ils sont heureux que notre journal brille sur la scène nationale. C’est une fierté partagée et c’est beau à voir. Je suis satisfait que mon travail soit reconnu, mais je suis surtout heureux du fait qu’il rejaillit sur la crédibilité et sur le rayonnement de l’Acadie Nouvelle. Pourquoi?
Parce qu’un bon éditorialiste sans
un bon journal, ça n’existe pas.
L’Acadie Nouvelle est beaucoup
plus crédible que l’on pense. Quand
on m’invite à titre d’éditorialiste à commenter l’actualité à RDI ou encore à la radio, on le fait parce que ces médias connaissent bien notre journal et le juge fiable dans son traitement de l’information ainsi que de ses prises de position éditoriale. Nous avons réussi à bâtir en équipe cette réputation et cette renommée de l’Acadie Nouvelle un jalon à la fois au cours des quatre dernières décennies et l’Acadie Nouvelle est maintenant reconnu
à sa juste valeur à la grandeur du
pays et ça aussi, c’est un très
grand accomplissement.