Aquapêches 2

Michel Légère

C’est certainement avec le cœur lourd que Michel Légère a décidé de se départir de son crevettier, le Marc-André-Guillaume. En effet, pratiquement, cela met fin à une tradition qui a perduré pendant quatre générations, et qui aurait peut-être pu se poursuivre pendant une cinquième, avec son petit-fils.

Aux prises avec une forte diminution de la ressource dans les dernières années et la prolifération du sébaste, qui constitue un prédateur majeur de la crevette, des pêcheurs comme Michel Légère se sont retrouvés devant un fait accompli. Et ce n’est pas faute d’avoir prévenu Pêches et Océans.

La sourde oreille

« Déjà, il y a au moins sept ans et même davantage, on avait vu que le sébaste commençait à être surabondant et que ces poissons consommaient 220 000 tonnes de crevettes par année, selon le comité consultatif sur la crevette. On a alors tiré sur la sonnette d’alarme devant l’ampleur du problème. Mais rien n’a bougé, et la situation s’est rapidement détériorée. »

Selon M. Légère si le MPO avait agi plus rapidement, cela aurait permis aux pêcheurs qui voulaient capturer le sébaste de préparer leurs bateaux en conséquence et de permettre aussi aux usines de transformation de se tenir prêts au cas où…

En janvier 2024, rappelons que le MPO a décidé de rouvrir la pêche au sébaste dans le golfe du Saint-Laurent avec un quota initial de 25 000 tonnes, mais seulement 10 % du contingent est réservé aux crevettiers. « 10 %, ça peut paraître paraît beaucoup, mais il y a 104 entreprises de pêche à la crevette dans le Golfe! Lorsqu’on répartit le 10 % parmi les 104 entreprises, c’est très peu. En plus, aucune usine au Nouveau-Brunswick n’est prête à transformer le sébaste, ce qui n’arrange rien. »

« Pour revenir au dossier de la pêche au sébaste, on n’a pas plus d’information précise au moment où on se parle. Est-ce que le quota va être augmenté? Quelles seront les conditions de pêche? Le type de chalut utilisé? Nous n’avons toujours aucune réponse à ces questions », déplore Michel Légère.

C’est donc une page d’histoire qui se tourne dans la Péninsule acadienne et pour la famille Légère. Avec la fin de la pêche à la crevette, on assiste à une fin abrupte qui aurait été difficile à croire si on avait soulevé cette possibilité dans un passé pas si lointain.