Le Collège a le vent dans les voiles – Une vie para-académique stimulante et formatrice
Activités culturelles
Le Collège NDA devient un centre d’activités culturelles pour la région (concerts, récitals, spectacles divers, projection de films). La chorale Notre-Dame d’Acadie sous la direction de Sr Lucienne, remporte à 5 reprises, entre 1952 et 1965, le trophée Lincoln accordé à la meilleure chorale adulte canadienne.
Le théâtre fut aussi un lieu important de formation ; des pièces classiques sont montées et présentées devant public. On y valorise également pour la première fois
une nouvelle forme d’acadianité, celle proposée par sa jeune autrice Antonine Maillet de Bouctouche, alors Sr Marie-Grégoire, qui enseigne la littérature, dont l’œuvre est en train de se faire reconnaître à l’échelle nationale. En 1958, elle obtient le prix du Festival national d’arts dramatiques pour sa pièce Poire-Acre qui a été jouée au collège. Celle qui deviendra la grande dame du théâtre acadien et qui incarnera la Sagouine, Viola Léger, Sr Andréa-Marie, est également enseignante au Collège NDA pendant cette période. La chanteuse Edith Butler de Paquetville et la chanteuse Angèle Arsenault d’Abram Village, à l’Île-du-Prince-Edouard, feront également leurs débuts sur scène dans l’auditorium du Collège NDA.
Débats et concours oratoires
Les débats oratoires regroupent au début les étudiantes du NDA et les collégiens de l’Université Saint-Joseph puis s’élargissent au-delà du sud-est de la province. Plusieurs thèmes sont abordés au fil des ans et quelques exemples s’avèrent significatifs au sujet des rapports entre les sexes. Ainsi, les étudiantes qui sont pourtant beaucoup moins nombreuses que leurs confrères gagnent la moitié des concours (7 fois sur 14, dont cinq par le Collège NDA et deux par le Collège Maillet de Saint-Basile) !
De même, le Collège NDA dut intervenir quand il avait été question de modifier les critères d’évaluation, le barème en vigueur et pour exiger le maintien d’un concours mixte, alors que l’Association générale des étudiants acadiens du Québec propose en 1958 deux concours et deux trophées, l’un pour les filles et l’autre pour les garçons. L’argument avancé stipule que la participation d’étudiantes infirmières et d’étudiantes normaliennes abaisserait le niveau du concours. Mais la supérieure du Collège NDA reste très ferme dans sa position pour le maintien de la mixité du concours. Le concours demeura mixte!
Le journal étudiant Bleuettes
Nommé d’abord Bleuettes en 1947, le journal changera de nom en 1964 et deviendra Rencontre jusqu’à la fermeture du collège en 1965. Dans le premier numéro, l’étudiante Ramona Godbout explique le choix du nom qui correspond à un « mot de chez nous, savoureux dans sa vieille pronunciation [sic] «beluette». […]
Une bleuette, ce n’est pas grand[-]chose en somme. Mais elle a son rôle : celui de propager le feu, d’enflammer toutes les bûches afin que la flamme monte bien droite, plus fière, plus UTILE. » Bien que le journal mériterait plus d’espace, une lecture de l’ensemble des numéros révèle un instrument utile à la disposition des étudiantes; différents thèmes y sont abordés, de même qu’une variété de chroniques. Une orientation plus politique, plus nationaliste et plus critique globalement se dégage toutefois au début des années 1960. L’image de la féminité reflète elle aussi les transformations du milieu en tentant de concilier la mentalité de l’époque qui valorisait le rôle d’épouse et de mère avec l’accès à des études supérieures pour des jeunes femmes.
Parfois contradictoires à première vue, les propos dans le journal étudiant de même que des discours prononcés par des religieuses correspondent à la conciliation caractérisée de « bachelière et cuisinière » plutôt que de choisir l’une ou l’autre option, comme nomment cette conciliation des chercheuses féministes du Québec. Consciemment ou non, ces femmes s’inscrivent dans un processus qui aboutira à l’éclatement du modèle traditionnel pour les femmes acadiennes. Plusieurs assumeront d’ailleurs des rôles de leadership dans les prochaines décennies.
Isabelle McKee-Allain